4 millions d'euros de préjudice financier : l'opération majeure de HARPIE
ORPAILLAGE CLANDESTIN

4 millions d'euros de préjudice financier : l'opération majeure de HARPIE

Gaëtan TRINGHAM (g.tringham@agmedias.fr)
Des soldats du 9e Rima et des gendarmes sur la rivière Maroni, en Guyane, lors d'une opération contre l'orpaillage clandestin, le 20 octobre 2021
Des soldats du 9e Rima et des gendarmes sur la rivière Maroni, en Guyane, lors d'une opération contre l'orpaillage clandestin, le 20 octobre 2021 • JODY AMIET (AFP)

Pendant sept semaines entre octobre et novembre, une mission "renforcée" de lutte contre l'orpaillage illégal a été engagée dans l'Ouest guyanais. Jusqu'à 500 soldats ont été déployés pour saisir, démanteler et détruire de nombreux biens aux garimpeiros. 

Les forces terrestres, aériennes, maritimes et fluviales : toutes mobilisées lors de cette "opération majeure de lutte contre l'orpaillage illégal." Au plus fort de l'opération, jusqu'à 500 soldats ont été déployés. 

Entre le 21 octobre et le 9 décembre, les gendarmes et les militaires sont envoyés sur les zones prioritaires définies par le préfet et le procureur de la République. L’objectif de cette opération renforcée est de neutraliser et de tenir les principaux sites du bassin de Beiman et des zones Lipo-Lipo, Atouka, Papaïchton et Dorlin, afin de précipiter le départ des garimpeiros hors du territoire. 

L'immense site aurifère de Dorlin, un des plus prisés par les orpailleurs, légaux comme illégaux.  • Archives

Pour l’occasion, le 9ème RIMa a déployé son poste de commandement à Grand-Santi, et le 3ème REI a conservé un poste de commandement tactique en forêt, indique la préfecture qui décrit ensuite le déroulé de l'action. 

 

Une neutralisation de grande ampleur

La première phase de l’opération a permis aux gendarmes et aux militaires de cloisonner la façade du fleuve Maroni et du littoral et de s’infiltrer en profondeur pendant une semaine. "La multiplicité des actions de harcèlement, d’insertion par voie fluviale et en quad, de reconnaissance et de déception a eu pour effet de déstabiliser les orpailleurs illégaux."

La deuxième phase, dite phase d’effort, a consisté à exploiter les premiers effets obtenus en neutralisant les sites illégaux des orpailleurs de la façade nord-ouest de la Guyane.

Démantèlement d'un camp d'orpaillage illégal au cours de cette dernière mission Harpie. • Services de l'Etat en Guyane

Cette étape majeure a produit un bilan conséquent : plus de 900 carbets démantelés, et saisie de 140 moteurs, 37 quads, 15 pirogues et leurs moteurs, 6 concasseurs, 90 groupes électrogènes, plus de 30 000 litres de carburant, plus de 12 km de tuyaux de chantier, 3 kg de mercure, 750 gr d’or, et plus de 50 tonnes de matériel et denrées diverses. Le préjudice financier de ces saisies s’élève pour l’adversaire à environ 4 millions d’euros.

 

LIRE AUSSI :

Tuerie de Dorlin : l'épilogue de plusieurs mois de traque

 

Puis le dispositif s'est progressivement désengagé "tout en maintenant la pression sur les orpailleurs."

 

Un effet d'inflation sur l'orpaillage illégal

Les sites prioritaires des bassins de l’Ouest guyanais ont été neutralisés et le flux logistique tari. En conséquence, la plupart des orpailleurs des sites visés sont partis.

Activité d’orpaillage réalisée directement sur la berge surinamaise, en amont de Papaïchton en juillet 2022  • Arnaud ANSELIN - PAG

Par ailleurs, cette opération renforcée a eu selon la préfecture de Guyane un "effet d’inflation sur l’économie générale de l’orpaillage illégal". La désorganisation des flux logistiques des orpailleurs illégaux a entraîné un accroissement des coûts d’acheminement, rendant l’exploitation des sites moins rentable et contribuant de fait au succès de cette phase renforcée.

 

Une opération qui intervient dans un contexte alarmant sur le Maroni

Nous en parlions en début de semaine, l'orpaillage est responsable d'une dégradation catastrophique de la biodiversité sur le bassin du Maroni. Le niveau de pollution extrême, et son aggravation alarmante, ont poussé le Conseil scientifique du Parc amazonien de Guyane à adopter une motion.

 

LIRE AUSSI :

Orpaillage : la dégradation catastrophique du Maroni

 

Cette pollution aiguë, caractérisée par la présence de rejets de boue, explique probablement la baisse significative du nombre d'espèces de poissons observées et du nombre de captures comparé à d'autres fleuves moins impactés.

Le fleuve Maroni est impactée de manière très visuelle par les effets de l'orpaillage illégal.   • ARNAUD ANSELIN - PAG

Cette situation conduit à une extrême précarisation des relations qu'ont les communautés locales avec leur environnement aquatique. Certains villages du Haut-Maroni ne peuvent plus boire l'eau directement ou indirectement issue de la rivière. Et comme le relevait le Conseil scientifique du Parc amazonien de Guyane : "Cette situation, couplée à d'autres facteurs sociaux, induit dans ces communautés un très fort sentiment d'abandon par les autorités françaises." 

Les missions HARPIE, de lutte contre l'orpaillage illégal sont essentielles. Mais considérant les facilités d'exploitation au Suriname voisin il est impossible d'ignorer le fait que "la préservation du Biome Amazonien est de nature transfrontalière et exige une complémentarité transnationale des cadres de gouvernance et d'action."

C'est ce que dit cette récente motion du Conseil scientifique du parc en insistant ensuite : "Une coopération étroite entre la France et le Suriname, couplée à une forte volonté politique conjointe, est la seule réponse possible pour enrayer la dégradation profonde, continue et peut-être irréversible du fleuve Maroni, et par conséquent du territoire Amazonien français."

Suivez l'info en temps réel
sur l'appli France-Guyane!

Télécharger